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CŒUR MAGNANIME

sance irrésistible sur cet être compatissant. Dès cet instant elle se trouvait toute conquise à Odile.

« Je crois — dit celle-ci — que Rodrigue vous appelait petite sœur, me permettez-vous de vous nommer ainsi ? »

La jeune fille, comparant sa haute taille à la taille chétive de sa belle-sœur, lui répondit en souriant.

— « Ce titre vous convient mieux, ma chérie, vous êtes si mignonne et si fragile. »

— « Eh bien alors, » répliqua la jeune veuve, je vous appellerai « grande sœur ».

— « C’est entendu » — répondit Anne-Marie et d’un geste maternel elle passa sa main blanche et fine sur le beau front lisse qui se tendait vers elle, puis dans un élan de tendresse protectrice, elle embrassa la jeune femme.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Odile gagna bien vite les sympathies. Cette toute jeune veuve, qui n’avait pas vingt ans, inspirait une unanime compassion. Monsieur et Madame Solier reportèrent sur elle la paternelle affection qu’ils avaient eu pour leur fils adoptif. Elle, dès la première rencontre, se sentit attirée vers ces deux vénérables vieillards ; ils lui parurent bien tels que son mari les lui avait dépeints : toujours remplis de mansuétude et de pitié pour autrui ; aussi les aima-t-elle à l’égal de ses propres parents.

« Grande Amie » retrouvait en elle un souvenir de la chère Patrie ; c’était comme un doux lien qui l’attachait plus que les autres à la femme de son ancien petit élève.