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SA VIE, SON ŒUVRE

armée d’un plumeau et d’un balai, innocente Bellone, se vit chassée rudement avec ses propres armes.

Charles Monselet ressemblait encore par là aux hommes de lettres du siècle dernier, voire du grand siècle, et se serait fort accommodé, à l’exemple de La Fontaine, d’un logement chez Mme de la Sablière, ou, à son défaut, chez M. d’Hervart.

Monselet vécut de la sorte assez isolé au milieu de ses contemporains, ses goûts ni son train de maison ne comportant dîners et réceptions ; mais les quelques intimes qui furent admis à sa table se sont rappelés l’homme aimable et enjoué qu’il était au milieu des siens : c’est alors que sa verve étincelait, que son érudition perçait sans recherche, que les anecdotes se suivaient sans relâche.

Après quelques années de mariage, Monselet en vint à transporter son cabinet de travail quai Voltaire, où il put s’enfermer et travailler à sa guise, loin du bruit que faisait autour de lui une jeunesse tapageuse ; cette existence n’empêcha pas notre écrivain de se montrer toute sa vie un mari excellent, un père incomparable. L’heure de la table le ramenait le soir, délivre ou à peu près des soucis de la vie matérielle ; il se livrait alors sans contrainte, et nulle table ne fut plus joyeuse que cette table de famille présidée par un si gai et si charmant convive.

Certes, c’était un gros mangeur, mais de goûts simples. Ajoutons qu’il ae déjeunait pas la plupart du temps, ce qui expliquait son remarquable appétit à l’heure du dîner.

À cette heure-là, c’était une détente, une explosion de gaîté, du bruit, du charme, du sans-gêne, de la vie en un mot : Monselet, dont la mémoire était prodigieuse, avait toujours quelque couplet de vaudeville pour chaque circonstance et toute la vie familiale se ressentait de cette gaîté perpétuelle.


Paul Arène, devant qui les portes du logis s’ouvrirent à