Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/210

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Seul de son opinion, le comte d’Ingrande estimait que c’était chose fort naturelle. Le tollé était général autour de lui.

— Comte, vous devenez un mystificateur ou un sophiste, lui dit un de ses interlocuteurs.

— Mais non, je vous jure ; je suis de bonne foi.

— Alors, vous vous démocratisez.

— Bon ! de grosses paroles déjà ! parce que je ne suis pas resté exclusivement l’homme de la Quotidienne.

— Mais une pareille mésalliance… ?

— Ce n’est qu’un mot.

Philippe Beyle entra à cet instant. Le comte d’Ingrande le salua de la main et du sourire, sans cesser d’être à la conversation.

— Je ne crois pas à la mésalliance, reprit-il.

Philippe, frappé de ce début, écouta.

— Ou plutôt, continua le comte, la mésalliance est de tous les temps et de toutes les modes. Elle est même de très bon goût à de certaines époques.

— Grand merci !

— Ces sont les mésalliances qui ont fait vivre la noblesse jusqu’à présent.

— Comment cela ?

— En la rattachant à l’humanité, en la sauvant elle-même de sa majestueuse solitude. Sans les mésalliances, le dernier marquis n’existerait plus aujourd’hui peut-être que dans les cabinets de figures de cire.

— Oh ! d’Ingrande, est-ce vous qui parlez ainsi ! vous presque un enfant de troupe de l’armée de Condé ?

— C’est vrai ; et, s’il y avait une armée de Condé, j’y serais encore ; mais il n’y en a plus, que je sache.

— N’importe !

— ‘’L’Almanach de Gotha’’, qui est d’ailleurs un ouvrage très remarquable, n’est pas pour moi le code des sociétés.

— Alors, comte, vous vous accommoderiez d’un gendre roturier ?

— Pourquoi pas ?