Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/34

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— Y a-t-il vraiment bien besoin d’être affiliée à des compagnies secrètes pour savoir que vous avez passé une saison à Londres ?

— La troupe anglaise était réellement supérieure cette année-là, dit le jeune homme, de plus en plus embarrassé.

La marquise ne le tint pas quitte du reste de l’interrogatoire.

— Quelle était la cantatrice à la mode ? demanda-t-elle, Marianna ou Jenny Lind ?

Cette fois, M. de Trémeleu la regarda pendant quelque temps sans lui répondre ; il semblait vouloir percer le sens de cette question. Enfin, il se décida.

— À Londres, c’était la Marianna, répondit-il.

— Et à Bruxelles ?

— Encore la Marianna.

— Je ne l’ai jamais entendue, reprit la marquise avec une affectation d’insouciance ; on lui prête beaucoup de talent. Est-elle Espagnole ou Italienne ?

— Je crois que c’est tout simplement une Française. Les directeurs auront donné à son nom une désinence artistique, Marianna au lieu de Marianne ou de Marie. C’est assez leur habitude. Mais… pour en revenir aux questions de Mme d’Ingrande, continua M. de Trémeleu, évidemment désireux de changer la conversation, comme il n’y a pas de théâtre à la Teste, et par conséquent pas d’opéra possible, je tourne forcément à l’ermite, je ne vois que très peu de personnes.

— Peut-être, cependant, avez-vous entendu prononcer le nom de celle qui me préoccupe, dit Mme d’Ingrande.

— Voyons, madame.

— M. Blanchard.

— Oh ! certes, s’écria M. de Trémeleu en souriant ; qui ne connaît pas ici M. Blanchard ?

— C’est sans doute un artiste ? dit Mme d’Ingrande.

— Du tout.

— Bah ! un homme du monde ?… fit-elle, avec un ton d’incrédulité.

— Ni l’un ni l’autre. M. Blanchard est un type. C’est un original qui passe sa vie à médire de l’originalité.