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petits mémoires littéraires

Sans y apporter un entrain qui n’était pas dans son tempérament, il savait déjà bien faire les choses, comme on dit. Il n’hésita pas à engager la Patti, devenue marquise de Caux, pour une série de représentations, au prix de 5,000 francs par soirée.

Mais je ne répondrais pas qu’il ait été l’applaudir.

Aujourd’hui, Hombourg-les-Jeux n’existe plus, et une demi-douzaine de buveurs de tisane se promènent devant la Maison de Conversation de Bade.

Mais Monte-Carlo s’est élevé sur ces deux ruines ; Monte-Carlo, l’œuvre la plus considérable de M. Blanc, sa création favorite enfin.

Là, M. Blanc a donné toute sa mesure et démasqué l’homme d’initiative qu’il était. À coups de millions, il a dégrossi un cap inculte, et d’un désert il a fait surgir le jardin le plus merveilleux du littoral de la Méditerranée.

Il n’y avait que lui qui put rêver et mener à bien un aussi colossal projet.

Croirait-on que cet homme d’une ambition si vaste fût le plus simple des hommes ! La tête bouillonnait, mais le visage restait immobile. On aurait dit, avec sa redingote noisette, un petit rentier, rêvant de construire une petite grotte dans son petit jardin, avec des lapins en plâtre et un jet d’eau.

M. Blanc eut énormément à lutter pour fonder le Casino de Monte-Carlo. Mais le ciel l’avait doué d’une forte dose de ténacité et d’une provision intarissable d’activité. Joignez à cela le nerf des affaires, — l’argent, — et l’on comprendra qu’il ait aplani les obstacles, comme il avait aplani les terrains. La vérité est qu’il a fait la prospérité des Niçois un peu malgré eux.