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petits mémoires littéraires

Ainsi : « J’en passe et des meilleurs. »

Ainsi : « Ceci tuera cela. »

Les vers-proverbes, on ne les compte plus. Toutes les jeunes fllles murmurent :

Elle aimait trop le bal, c’est ce qui l’a tuée.

Les publicistes à la recherche d’une attitude :

Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là !

Je prends au hasard de la mémoire, à la volée.

Ses personnages fictifs se sont changés en personnages réels.

Qui de plus réel, en effet, que Quasimodo ? Victor Hugo a refait un Gringoire plus touchant que celui de l’histoire. Sa Marion de Lorme a détrôné à jamais celle de la légende. Il n’y aura plus dorénavant d’autre Lucrèce Borgia que la sienne ; il n’y aura plus d’autre Triboulet que le sien. Le nom de Gavroche est inséparable de l’image d’un gamin parisien.

Nul plus que Victor Hugo n’a fourni des sujets à la musique et à la peinture. Tous ses drames ont été transformés à l’étranger en opéras et en ballets : la Esméralda, Rigoletto, Ernani, Lucrezia Borgia, Ruy-Blas.

Il faut bien qu’il y ait là l’indice d’une puissance créatrice, — car enfin, de tous les écrivains qu’on a essayé d’opposer à M. Victor Hugo, aucun n’a jamais rien fourni aux arts, pas même Ponsard. Ce pauvre Ponsard n’a rien inspiré du tout, ni un dessin, ni une mélodie, ni une statuette.

On peut faire un livre intitulé : les Femmes de Victor Hugo, comme on a fait les Femmes de Shakspeare et les Femmes de lord Byron.