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Page:Monselet - Petits mémoires littéraires, 1885.djvu/248

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petits mémoires littéraires

pour cette demoiselle ; mais le jeune homme, bien qu’il fût aimé, avait trop de fortune pour qu’elle consentît à devenir sa femme. Le bachelier, n’ayant pu venir à bout de cette résistance, que son âge motivait aussi, prit congé de Paris et voyagea beaucoup, dans l’espoir d’oublier. À son retour, il publia des vers : les Morts bizarres, puis Max, roman…⋅ La pensionnaire de mademoiselle Sauvan était devenue institutrice ; Legouvé, ayant vingt-huit ans, la décida enfin à l’épouser. »

Il est bien entendu que je laisse à l’historien du lycée Bonaparte la responsabilité des détails de ce petit roman, dont je n’aurais pas parlé sans la garantie de la chose imprimée. Tout y est, du reste, à l’honneur des deux héros. — Mais il est temps d’arriver à l’homme de lettres.

Il ne paraît pas que M. Ernest Legouvé ait hésité un seul instant à « se faire » littérateur. Obéissait-il à une vocation ou à l’instinct héréditaire ? M. Taine inclinerait vers cette dernière, supposition. Toutefois est-il qu’à sa majorité le vertueux Bouilly lui aurait remis vingt mille bonnes livres de rentes, — toujours selon M. Ch. Lefeuve, — ce qui est, dans tous les cas, une excellente base d’opérations. Avec cet esprit de méthode qui parait l’avoir continuellement guidé, M. Ernest Legouvé alla tout de suite déposer une carte de visite à l’Académie française, c’est-à-dire un discours en vers sur la Découverte de l’Imprimerie, qui fut immédiatement couronné.

Dix ans après (je passe sous silence plusieurs essais peu remarqués), il aborda le théâtre d’une façon assez brillante par un drame en cinq actes, Louise de Ligneroles, où le talent de mademoiselle Mars jeta ses dernières lueurs. Ce drame aux lignes sévères, aux