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petits mémoires littéraires

Mais quel succès pouvait tenir contre les agitations du moment ? L’Aventurière disparut au bout de quelques représentations. Plus tard, remaniée avec soin, elle a toujours été accueillie avec faveur ; elle fait aujourd’hui partie du répertoire courant de la Comédie-Française ; et pour beaucoup de personnes, — parmi lesquelles je me compte, — elle est encore le meilleur titre poétique de M. Émile Augier, celui où il est entré le moins d’alliage.

À quel caprice frivole obéit M. Émile Augier en s’associant, l’année suivante, à Alfred de Musset, pour transformer un proverbe de celui-ci, la Montre, en un vaudeville, l’Habit vert ? C’était bien inutile, assurément. J’ai vu jouer cet Habit vert au théâtre des Variétés, par Charles Pérey et Rébard, et il ne m’en est resté aucune impression.

Par exemple, le 13 décembre 1849 est une date significative dans la carrière de M. Émile Augier. C’est la date de la première représentation de Gabrielle. Les temps étaient moins noirs ; on revenait aux distractions de l’esprit. Il y avait une belle salle au théâtre de la République, telle qu’on n’en avait vu depuis quelque temps. On s’attendait évidemment à quelque chose, à un événement littéraire ; au lieu de cela, on eut un triomphe bourgeois, mais aussi éclatant qu’on pouvait le rêver. Tout a été dit sur Gabrielle ; tout a été écrit sur cette apothéose du notariat. Il y aurait méchanceté inutile à y insister.

L’Académie française (nous y arrivons) décerna un demi-prix de vertu à ce drame de ménage. L’autre moitié fut donnée à la Fille d’Eschyle, de M. Autran.

À partir de cette Gabrielle, M. Émile Augier tâtonne et trébuche dans sa voie. Il fait jour le Joueur de