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naires. Démocrates anciens et récents, Mirabeau et Lamartine, Robespierre et Proudhon, Michelet et Victor Hugo, il les passa tous au fil de sa plume. Il apporta à cette besogne un entrain et une passion qu’on lui soupçonnait, mais qui jusque-là avaient manqué d’occasions, du moins sérieuses, pour se produire. Son talent se doubla de tout son désappointement. La loi sur les signatures aidant, il se trouva tout à coup en pleine lumière. L’ingrat ! il dut à cette révolution méconnue par lui (méconnue lui paraîtra bien faible, même à distance) le commencement de sa vraie réputation, de sa réputation d’écrivain.

À partir de ce moment, sa collaboration au Journal des Débats devint très active. Il remplit le feuilleton de ses articles, facilement inclinés vers la polémique, et lutta jusqu’à la dernière heure, c’est-à-dire jusqu’à l’installation de l’Empire. Alors seulement, l’ancien secrétaire du roi de Hollande se résigna. Par un de ces tours de roue si fréquents dans l’histoire, il voyait revenir au pouvoir ces Bonaparte qu’il avait tous connus dans l’exil et qu’il ne lui était pas permis personnellement de haïr.

Dès lors, M. Cuvillier-Fleury, sans renoncer d’une manière absolue à la discussion politique, se tourna vers les questions littéraires qui, d’ailleurs, sous le nouvel Empire, devaient acquérir une importance assez considérable. Plus que jamais il se tint à l’affût des courants ; et insensiblement, pied à pied, il conquit cette notoriété et cette autorité dont il fut si longtemps en possession.

M. Cuvillier-Fleury a réuni en volumes la plupart de ses travaux critiques.

Une variété infinie préside aux sujets traités. Ce sont de ces livres qui vont de Joseph de Maistre à Piron, de