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petits mémoires littéraires

Désormais, le nom d’Auguste Barbier était consacré ; sa place était faite.

On vit paraître successivement l’Idole, Melpomène, la Cuve, autant de sursauts imprimés à l’attontion publique. Dans la grande symphonie romantique c’était une note nouvelle. Sifflant comme une flèche ou brutal comme un épieu, son vers s’enfonçait dans la mémoire pour n’en plus sortir.

Réunis en volume, les Iambes (1831, Urbain Canel) furent vite épuisés. La première édition est une rareté ; elle contient une assez longue préface signée de l’éditeur, mais en réalité sortie de la plume de Philarète Chasles.

Pour reprendre haleine, autant que pour varier ses sujets, M. Auguste Barbier entreprit un voyage en Italie avec son ami Brizeux. Il en revint avec un poème. Il Pianto (la Plainte), qui renferme d’admirables parties. La douceur d’âme de son compagnon s’y reflète souvent et accuse l’étroite communauté de sentiments qui existait entre ces deux nobles esprits. En 1837, le poème de Lazare, résultat d’un voyage en Angleterre, accompli seul, celui-là, vint s’ajouter au Pianto.

Les Iambes, Il Pianto, Lazare, forment une trilogie d’une rare splendeur. À ce volume, certains critiques ont prétendu borner l’œuvre poétique de Barbier. Cela est souverainement injuste. Le grand poète s’est souvent retrouvé dans Erostrate et surtout dans les Rimes héroïques, — où sont célébrés indistinctement Christophe Colomb, Mathieu Mole, Las-Cases, Kosciusko, et en général tous les honnêtes cœurs de tous les pays.

Un brave homme est pour moi chose belle et touchante.
Qu’il vive sous le marbre ou sous un toit de bois,
Qu’il sorte du bas peuple ou descende des rois,
Quand je vois un brave homme, aussitôt je le chante.