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petits mémoires littéraires

le rattache à la liguée des Demoustier, des Andrieux, des Casimir Delavigne, de tous ces esprits honnêtes, ingénieux, que le public aime du premier coup et comprend dès le premier vers. Il ne cherche pas à corriger les mœurs, il lui suffit de « fronder les ridicules ». Pour cela, il n’a besoin que du style de ses prédécesseurs, de cette langue sobre d’ornements ou qui n’admet que les images consacrées.

De toutes ses pièces, la Considération est celle où il a le plus essayé d’élever son essor.

La Considération discute un point d’un haut intérêt social : la probité selon le code et la probité selon la conscience. Un négociant malheureux ou maladroit, spéculateur ruiné et ruinant, prenant des arrangements, comme on dit, avec ses créanciers, leur donnant vingt ou vingt-cinq pour cent ; puis réédifiant sa fortune et en enveloppant le passé dans un égoïste oubli, — tel est le personnage que M. Camille Doucet a mis en lumière, personnage bien observé, mélange de faiblesse et de vanité, d’irréflexion et… d’indélicatesse. Maintenant, voici le fond de la pièce : ce que fait le Georges de l’Honneur et l’Argent pour son père mort, le Lucien de la Considération le fait pour son père vivant ; il désintéresse ses victimes et se résout à la pauvreté pour recouvrir un nom intact. Il est récompensé de son sacrifice par un beau mariage.

Il y a beaucoup de chiffres là-dedans, et la poésie a bien de la peine à se faire jour à travers les livres de caisse ; elle y parvient quelquefois cependant. Un général dit à deux amoureux :

XXXXXXXXXXX …… Ne vous dérangez pas !
Je connais la chanson que vous chantez là-bas ;
On l’apprend à seize ans, on l’oublie à soixante ;
Je ne la chante plus, mais j’aime qu’on la chante.