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petits mémoires littéraires

Et maintenant, ô Thémis, qu’auriez-vous pu faire de moi ? « La grande foudre des cieux ne bombarde pas une laitue ! » comme dit Gringoire dans Notre-Dame de Paris


Dans notre monde de lettrés d’autrefois, nous nous souvenons encore de Jean Du Boys.

Il faisait partie, avec Charles Bataille et Amédée Rolland, de cette petite bande qui s’était emparée de l’Odéon, sous la première direction de M. de la Rounat, et qui y faisait représenter des drames bâclés en collaboration et en trois semaines.

Entre temps, on acceptait de menus travaux qui faisaient « aller la marmite ». Ce fut ainsi qu’un ministre éperdu demanda un jour une cantate à Du Boys. C’était alors la mode des cantates ; on célébrait l’empire et l’empereur, et l’on touchait pour cela une médaille en or de six cents francs environ.

Philoxène Boyer, qui n’avait aucune espèce de conviction en dehors de la poésie, s’est souvent miré dans ces médailles-là.

Avant de s’exécuter, Du Boys prit conseil de ses amis, qui, vu l’importance de la somme, furent d’avis qu’il y avait lieu à faire céder momentanément ses principes. Il les reprendrait plus tard.

Le jour où Du Boys vit le coursier d’un dragon s’abattre, blanc d’écume, à son seuil, en lui apportant la magique médaille d’or, ce jour-là fut un beau jour pour la petite bande. Il fut résolu, séance tenante, qu’on mangerait ce disque éclatant, ce qui était le seul moyen d’en atténuer la signification politique.