Page:Monselet - Portraits après décès, 1866.djvu/194

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pas. Dix paroles détraquent mon appareil… Savez-vous que je suis tout voisin des Visitandines ? Ces bonnes sœurs m’ont accablé de prévenances & de confitures. Elle ont un sirop pectoral infaillible qu’on finira par me faire prendre, quoique je ne croie à aucun sirop, à aucune eau, à aucune tisane, mais seulement au bon régime & à la grâce de Dieu. Que vous dirai-je encore de ce benoît pays ? que j’y prends la mesure d’une retraite, sinon d’une bière. »

De ville en ville, il se traîna de la sorte jusqu’en Italie ; il passa l’hiver de 1846 à Pise, mais il était condamné, il le savait, & il s’en revint. Dans les rues de Paris, on vit alors passer l’ombre d’Édouard Ourliac : un corps fiévreux, une voix éteinte. Quoique marié, il ne vivait plus qu’avec son père, un vieillard de soixante-dix ans ; pour le faire vivre, il accepta une petite place dans les bureaux de la marine, car il commençait à manquer de force pour le métier littéraire. Il s’était limité à deux feuilletons par mois. Miséricorde ! nous avons à peine le courage de continuer. Dans ce bureau de la marine, Édouard Ourliac restait quelquefois des heures entières sans pouvoir lever le bras. Il employa sa dernière énergie à réconcilier son père avec Dieu ; grâce à ses exhortations, le vieillard, quelques jours avant sa mort, fit sa première communion. Alors, dégagé de tous devoirs envers les autres hommes, Our-