« Et tu, baissele[1], vien avant ;
Parole à moi[2], je te commant ;
Respont à moi[3] quant je t’apel,
Que claimes tu en ceste pel[4] ?
— Sire, trestoute la pel cleim, »
Dist la meschine[5] au chapelain.
— Et vous, que dites, bele dame ?
— Sire, se Dieus ait part en m’ame[6],
Ele doit estre par droit[7] moie.
— Ele n’ert ne vostre, ne soie.
Je l’acatai de mon avoir ;[8]
Ele me doit bien remanoir.
Il m’en vint priier au moustier,
Là ù ge lisoie men sautier.
Par saint Pierre, le vrai apostre,
Ele n’iert ne soie ne vostre.
Se par jugement ne l’avés. »
Seignor, vous qui les biens savez,[9]
Huistaces[10] d’Amiens vous demande,
Et prie par amors, et mande[11]
Que vous faciez cest jugement[12].
Bien et à droit et leaument,[13]
Chascuns en die son voloir
Liquels doit mieus la pel avoir,
Ou li prestres, ou la prestresse,
Ou la meschine piprenesse.[14]
- ↑ 561 — baissele. C, baiasse.
- ↑ 562 — B, Parlés à moi. — Ce vers et le précédent sont intervertis dans B.
- ↑ 563 — B, C, Parole à moi.
- ↑ 564 — B, sour cele. C, sur ceste.
- ↑ 566 — meschine. C, baiasse. — Ce vers manque à B, où il est remplacé par le suivant, placé avant le vers 563 :
Foi que doi vous que je molt aim.
- ↑ 568 — B, C, de m’ame.
- ↑ 569 — B, par droit estre.
- ↑ 571-576 — Ces vers manquent dans A et C.
- ↑ 578 — C, Vous qui cest conte oï avez.
- ↑ 579 — B, Vuistasses.
- ↑ 580 — B, Par amors et prie et commande. C, Et vous [en] prie et vous comande.
- ↑ 581 — C, le jugement.
- ↑ 582 — C, Chascuns en die son talent.
- ↑ 586 — C, Ou la baiasse pinprenesse.
Ce fabliau, qui offre une certaine analogie avec le conte de La Fontaine : A femme avare galant escroc, se retrouve dans un conte de Chaucer ; c’est aussi, à peu de chose près, le sujet de l’Anser venalis du Pogge, de la nouvelle XVIIIe des Cent Nouvelles nouvelles et d’une histoire de Boccace (journ. VIII, nouv. I) ; d’autres imitations existent encore.