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Page:Montalembert - Du devoir des catholiques dans la question de la liberté d’enseignement.djvu/14

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s’en émut pas autant que d’une escarmouche perdue ou d’une revue manquée.

Veut-on une autre preuve de la différence des résultats que produisent les deux systèmes ? La voici. On s’étonne quelquefois de la facilité avec laquelle l’immense ville de Londres, avec ses deux millions d’habitants, est maintenue dans l’ordre par une garnison de trois petits bataillons et de deux escadrons, tandis qu’il faut pour contenir la capitale de la France, moins grande de moitié que celle de l’Angleterre, deux armées, l’une de quarante mille hommes de troupe de ligne, l’autre de soixante mille gardes nationaux. Mais quand on arrive pour la première fois à Londres un dimanche matin, quand on voit dans cette gigantesque métropole tout suspendu par obéissance à Dieu ; quand, dans ce centre d’affaires colossales, d’intérêts innombrables, et du mouvement commercial le plus étendu de l’univers, dans ce port où viennent chaque jour débarquer les produits des cinq parties du monde, on voit régner un vaste silence, un repos complet, interrompu à peine par la cloche de la prière et les flots pressés d’une population qui va remplir les églises, alors l’étonnement cesse : on comprend qu’il y a un autre frein pour un peuple chrétien que celui des baïonnettes ; et que là où la loi de Dieu est exécutée avec une aussi solennelle docilité, Dieu lui-même, si je l’ose dire, se charge de faire la police.