Page:Montalembert - Du devoir des catholiques dans la question de la liberté d’enseignement.djvu/16

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esprit, sera de supposer que son concitoyen professe sérieusement et de fait l’une des religions existantes en France. De toutes les exceptions que son imagination aura pu se figurer, celle-là sera à coup sûr la plus rare et la plus improbable.

Bien plus, et cela se voit chaque jour, on vit ensemble pendant des années entières dans un corps politique, dans un tribunal, dans un conseil ou une assemblée quelconque, et l’on est tout étonné de découvrir un jour, par quelque hasard, qu’on a pour collègue et voisin un homme qui croit à la vérité catholique, et qui pratique sa croyance, sans que personne s’en doutât, tant l’organisation sociale laisse chez nous peu de place à la foi religieuse, tant elle en rend la profession inutile ou impopulaire, dangereuse ou ridicule.

En vain voudrait-on, par je ne sais quelle distinction bizarre, établir qu’au dehors le catholicisme c’est la France, et que les grands politiques qui président à nos destinées doivent se poser, aux yeux de l’étranger, comme les défenseurs spéciaux d’une religion à laquelle ils sont eux-mêmes hostiles ou indifférents. C’est là l’illusion de quelques âmes généreuses et inquiètes à bon droit de l’avenir de la patrie ; c’est aussi la prétention de quelques meneurs moins aveuglés que d’autres par la passion antireligieuse ; mais elle n’ira pas loin. Ni Dieu ni les hommes n’admettront cette fiction insolente qui permettrait à certains hommes de représenter au