CHAPITRE XXII.
Les premiers Romains n’eurent point de lois pour régler le taux de l’usure [1]. Dans les démêlés qui se formèrent là-dessus entre les plébéiens et les patriciens, dans la sédition [2] même du mont Sacré, on n’allégua d’un côté que la foi, et de l’autre que la dureté des contrats.
On suivoit donc les conventions particulières ; et je crois que les plus ordinaires étoient de douze pour cent par an. Ma raison est que, dans le langage [3] ancien chez les Romains, l’intérêt à six pour cent étoit appelé la moitié de l’usure, l’intérêt à trois pour cent le quart de l’usure : l’usure totale étoit donc l’intérêt à douze pour cent.
Que si l’on demande comment de si grosses usures avoient pu s’établir chez un peuple qui étoit presque sans commerce [4], je dirai que ce peuple, très-souvent obligé d’aller sans solde à la guerre, avoit très-souvent besoin d’emprunter ; et que, faisant sans cesse des expéditions heureuses, il avoit très-souvent la facilité de payer. Et
- ↑ Usure et intérêt signifioient la même chose chez les Romains. (M.)
- ↑ Voyez Denys d’Halicarnasse qui l’a si bien décrite. (M.)
- ↑ Ustirœ semisses, trientes, quadrantes, Voyez là-dessus les divers traités du Digeste et du Code de usuris ; et surtout la loi 17, avec sa note, au ff. de usuris. (M.)
- ↑ C'est chez les peuples sans commerce que l’argent est le plus rare, et, par conséquent, le plus cher.