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Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/66

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CHAPITRE XVIII.


CHARLEMAGNE [1].


Charlemagne songea à tenir le pouvoir de la noblesse dans ses limites, et à empêcher l’oppression du clergé et des hommes libres. Il mit un tel tempérament dans les ordres de l’État, qu’ils furent contrebalancés, et qu’il resta le maître. Tout fut uni par la force de son génie. Il mena continuellement la noblesse d’expédition en expédition ; il ne lui laissa pas le temps de former des desseins, et l’occupa tout entière à suivre les siens. L’empire se maintint par la grandeur du chef : le prince étoit grand, l’homme l’étoit davantage. Les rois ses enfants furent ses premiers sujets, les instruments de son pouvoir, et les modèles de l’obéissance. Il fit d’admirables règlements ; il fit plus, il les fit exécuter. Son génie se répandit sur toutes les parties de l’empire. On voit, dans les lois de ce prince, un esprit de prévoyance qui comprend tout, et une certaine force qui entraîne tout. Les prétextes [2] pour éluder les devoirs sont ôtés ; les négligences corrigées, les abus réformés ou prévenus. Il savoit punir ; il savoit encore mieux pardonner. Vaste dans ses desseins, simple dans

  1. Les premières éditions écrivent Charle-Magne.
  2. Voyez son capitulaire III de l'an 811, p. 486, art. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8 ; et le capitulaire I de l'an 812 ; p. 490, art. 1 ; et le capitulaire de la même année, p. 494, art. 9 et 11 ; et autres. (M.)