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Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 1.djvu/419

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CHAPITRE XI.

Des loix qui ont rapport aux maladies du climat.


HÉRODOTE[1] nous dit que les loix des juifs sur la lepre ont été tirées de la pratique des Egyptiens. En effet,les mêmes maladies demandoient les mêmes remedes. Ces loix furent inconnues aux Grecs & aux premiers Romains, aussi bien que le mal. Le climat de l’Égypte & de la Palestine les rendit nécessaires ; & la facilité qu’a cette maladie à se rendre populaire nous doit bien faire sentir la sagesse & la prévoyance de ces loix.

Nous en avons nous-mêmes éprouvé les effets. Les croisades nous avoient apporté la lepre ; les réglemens sages que l’on fit l’empêcherent de gagner la masse du peuple.

On voit, par la loi[2] des Lombards, que cette maladie étoit répandue en Italie avant les croisades, & mérita l’attention des législateurs. Rotharis ordonna qu’un lépreux, chassé de sa maison, & relégué dans un endroit particulier, ne pourroit disposer de ses biens ; parce que, dès le moment qu’il avoit été tiré de la maison, il étoit censé mort. Pour empêcher toute communication avec les lépreux, on les rendoit incapables des effets civils.

Je pense que cette maladie fut apportée en Italie par les conquêtes des empereurs Grecs, dans les armées desquels il pouvoit y avoir des milices de la Palestine ou de l’Égypte. Quoi qu’il en soit, les progrès furent arrêtés jusqu’au temps des croisades.

On dit que les soldats de Pompée, revenant de Sy-


  1. Liv. II.
  2. Liv. II, tit. 1, §. 3, & tit. 18, §. 1.