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Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 1.djvu/479

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CHAPITRE VII.

Des ouvrages des hommes.


LES hommes, par leurs soins & par de bonnes loix, ont rendu la terre plus propre à être leur demeure. Nous voyons couler les rivieres là où étoient des lacs & des marais : c’est un bien que la nature n’a point fait, mais qui est entretenu par la nature. Lorsque les Perses[1] étoient les maîtres de l’Asie, ils permettoient à ceux qui ameneroient de l’eau de fontaine en quelque lieu qui n’auroit point été encore arrosé, d’en jouir pendant cinq générations ; &, comme il sort quantité de ruisseaux du mont Taurus, ils n’épargnerent aucune dépense pour en faire venir de l’eau. Aujourd’hui, sans sçavoir d’où elle peut venir, on la trouve dans ses champs & dans ses jardins.

Ainsi, comme les nations destructrices font des maux qui durent plus qu’elles, il y a des nations industrieuses qui font des biens qui ne finissent pas même avec elles.


CHAPITRE VIII.

Explication d’un paradoxe des anciens, par rapport aux mœurs.


LES loix ont un très-grand rapport avec la façon dont les divers peuples se procurent la subsistance. Il faut un code de loix plus étendu pour un peuple qui s’attache au commerce & à la mer, que pour un peuple qui se contente de cultiver les terres. Il en faut un

  1. Polybe, liv. X.