Aller au contenu

Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/275

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Chapitre IV.

Des lois qui choquent les vues du législateur.


Il y a des lois que le législateur a si peu connues, qu’elles sont contraires au but même qu’il s’est proposé. Ceux qui ont établi chez les Français que, lorsqu’un des deux prétendants à un bénéfice meurt, le bénéfice reste à celui qui survit, ont cherché sans doute à éteindre les affaires. Mais il en résulte un effet contraire : on voit les ecclésiastiques s’attaquer et se battre, comme des dogues anglais, jusqu’à la mort.


Chapitre V.

Continuation du même sujet.


La loi dont je vais parler se trouve dans ce serment, qui nous a été conservé par Eschine[1]  : « Je jure que je ne détruirai jamais une ville des Amphictyons, et que je ne détournerai point ses eaux courantes : si quelque peuple ose faire quelque chose de pareil, je lui déclarerai la guerre, et je détruirai ses villes. » Le dernier article de cette loi, qui paraît confirmer le premier, lui est réellement contraire. Amphictyon veut qu’on ne détruise jamais les villes grecques, et sa loi ouvre la porte à la destruction de ces villes. Pour établir un bon droit des gens parmi les Grecs, il fallait les accoutumer à penser que c’était une chose atroce de détruire une ville grecque ; il ne devait donc pas détruire même les destructeurs. La loi d’Amphictyon était juste, mais elle

  1. De falsâ legatione.