Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/397

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Chapitre XXI.

Continuation du même sujet.


La force que Charlemagne avait mise dans la nation subsista assez sous Louis le Débonnaire, pour que l’État pût se maintenir dans sa grandeur, et être respecté des étrangers. Le prince avait l’esprit faible ; mais la nation était guerrière. L’autorité se perdait au-dedans, sans que la puissance parût diminuer au-dehors.

Charles Martel, Pépin et Charlemagne gouvernèrent l’un après l’autre la monarchie. Le premier flatta l’avarice des gens de guerre ; les deux autres celle du clergé ; Louis le Débonnaire mécontenta tous les deux.

Dans la constitution française, le roi, la noblesse et le clergé avaient dans leurs mains toute la puissance de l’État. Charles Martel, Pépin et Charlemagne se joignirent quelquefois d’intérêts avec l’une des deux parties pour contenir l’autre, et presque toujours avec toutes les deux : mais Louis le Débonnaire détacha de lui l’un et l’autre de ces corps. Il indisposa les évêques par des règlements qui leur parurent rigides, parce qu’il allait plus loin qu’ils ne voulaient aller eux-mêmes. Il y a de très bonnes lois faites mal à propos. Les évêques, accoutumés dans ces temps-là à aller à la guerre contre les Sarrasins et les Saxons, étaient bien éloignés de l’esprit monastique. D’un autre côté, ayant perdu