l’autorité de messieurs Tavernier et Chardin. Ah ! bon Dieu ! dis-je en moi-même, quel homme est-ce là ? Il connoîtra tout à l’heure les rues d’Ispahan mieux que moi ! Mon parti fut bientôt pris : je me tus, je le laissai parler, et il décide encore.
LETTRE lxxiii.
’ai ouï parler d’une espèce de tribunal qu’on appelle l’académie françoise : il n’y en a point de moins respecté dans le monde ; car on dit qu’aussitôt qu’il a décidé, le peuple casse ses arrêts, et lui impose des lois qu’il est obligé de suivre.
Il y a quelque temps que, pour fixer son autorité, il donna un code de ses jugements. Cet enfant de tant de pères étoit presque vieux quand il naquit ; et, quoiqu’il fût légitime, un bâtard, qui avoit déjà paru, l’avoit presque étouffé dans sa naissance.
Ceux qui le composent n’ont d’autres fonctions que de jaser sans cesse : l’éloge va se placer comme de lui-même dans leur babil éternel ; et sitôt qu’ils sont initiés dans ses mystères, la fureur du panégyrique vient les saisir et ne les quitte plus.
Ce corps a quarante têtes, toutes remplies de figures, de métaphores et d’antithèses ; tant de