Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/84

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Comme il trouve bizarres nos coutumes, il trouve quelquefois de la singularité dans de certaines choses de nos dogmes, parce qu’il les ignore, et il les explique mal, parce qu’il ne connoît rien de 5 ce qui les lie et de la chaîne où ils tiennent.

Il est vrai qu’il y a quelque indiscrétion à avoir touché ces matières, puisque l’on n’est pas aussi sûr de ce que peuvent penser les autres, que de ce qu’on pense soi-même.

io 112* (2033. m, f° 320 v°). — Préface de l’Éditeur. — Ce qui fait le mérite principal des Lettres persanes, c’est qu’on y trouve, sans y penser, une espèce de roman. On en voit le commencement, le progrès, la fin. Les divers personnages sont

i5 placés dans une chaîne qui les lie. A mesure qu’ils font un plus long séjour en Europe, les mœurs de cette partie du Monde prennent dans leur tête un air moins merveilleux et moins bizarre, et ils sont plus ou moins frappés de ce bizarre et de ce mer

a» veilleux suivant la différence de leurs caractères. D’un autre côté, le désordre croît dans le sérail d’Asie à proportion de la longueur de l’absence d’Usbeck, c’est-à-dire à mesure que la fureur augmente et que l’amour diminue.

i5 D’ailleurs, ces sortes de romans réussissent ordinairement, parce que l’on rend compte soi-même de sa situation actuelle ; ce qui fait plus sentir les passions que tous les récits qu’on en pourroit faire, et c’est une des causes du succès de Pamêla et des Lettres pé

30 ruviennes (ouvrages charmants qui ont paru depuis).