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De l’esprit des Lois,

pareil entre le maître & les esclaves seroit raisonnable dans les pays où les maîtres ont droit de vie & de mort.

La loi de Moïse étoit bien rude. « Si quelqu’un frappe son esclave, & qu’il meure sous sa main, il sera puni : mais s’il survit un jour ou deux, il ne le sera pas, parce que c’est son argent ». Quel peuple, que celui où il falloit que la loi civile se relâchat de la loi naturelle !

Par une loi des Grecs[1], les esclaves trop rudement traités par leurs maîtres, pouvoient demander d’être vendus à un autre. Dans les derniers temps, il y eut à Rome une pareille loi[2]. Un maître irrité contre son esclave, & un esclave irrité contre son maître, doivent être séparés.

Quand un citoyen maltraite l’esclave d’un autre, il faut que celui-ci puisse aller devant le juge. Les[3] lois de Platon & de la plupart des peuples, ôtent aux esclaves la défense naturelle : il faut donc leur donner la défense civile.

À Lacédémone, les esclaves ne pouvoient avoir aucune justice contre les insultes ni contre les injures. L’excès de

  1. Plutarque, de la superstition.
  2. Voyez la constitution d’Antonin Pie, Institus, Liv. I. tit. 7.
  3. Livre IX.