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Liv. XIX. Chap. XXVII.

des traités réciproquement utiles avec la nation qu’elle auroit choisie.

Dans un état où d’un côté l’opulence seroit extrême, & de l’autre les impôts excessifs, on ne pourroit guere vivre sans industrie avec une fortune bornée. Bien des gens, sous prétexte de voyages ou de santé, s’exileroient de chez eux, & iroient chercher l’abondance dans les pays de la servitude même.

Une nation commerçante a un nombre prodigieux de petis intérêts particuliers ; elle peut donc choquer & être choquée d’une infinité de manieres. Celle-ci deviendroit souverainement jalouse ; & elle s’affligeroit plus de la prospérité des autres, qu’elle ne jouiroit de la sienne.

Et ses lois d’ailleurs douces & faciles, pourroient être si rigides à l’égard du commerce & de la navigation qu’on feroit chez elle, qu’elle sembleroit ne négocier qu’avec des ennemis.

Si cette nation envoyoit au loin des colonies, elle le feroit plus pour étendre son commerce que sa domination.

Comme on aime à établir ailleurs ce qu’on trouve établi chez soi, elle donneroit aux peuples de ses colonies la