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Page:Moréas - Trois Contes, 1921.djvu/18

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Jeanne, si vous gardez encore le souvenir de votre vie passée et de mon honnêteté, — que vous nommiez peut-être dureté et cruauté, — ce que je viens faire ici aujourd’hui vous paraîtra, sans nul doute, merveilleusement présomptueux. Mais si vous aviez des enfants, ou si vous en aviez eu, vous sauriez quelle tendresse on leur porte. Alors vous pourriez, certainement, m’excuser en partie.

Frédéric, je suis mère, et les naturelles lois forcent ma volonté. Contre cette volonté, contre la convenance, je viens vous supplier de me céder une chose à laquelle vous tenez justement : puisque c’est le seul plaisir, le seul passe-temps, la seule affection, la seule consolation qui vous reste dans votre mauvaise fortune… C’est votre faucon que je viens vous demander… Mon fils, mon unique enfant est malade, et il désire votre faucon, il le désire tant, que je crains pour sa vie, si je n’obtiens pas de vous cet oiseau… Ce n’est point par l’amour que vous m’avez porté, car il ne vous