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Page:Moréri - Grand dictionnaire historique, 1716 - vol. 1.djvu/41

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& le Roi Pierre remonta ſur le throne. Aba fut enterré dans une Chapelle proche d’un village nomme Stebe, & l’on dit que quelques années après, en fouillant la terre, on trouva ſon corps envelopé de ſon ſuaire, non ſeulement tout entier, mais même ſans aucune cicatrice des playes qu’il avoit reçûës. On le tranſporta de là dans l’Egliſe du Monaſtere de Saran, qu’il avoit fait bâtir. * Bonfin. lib. 2. Dec. 2. SUP.

ABA, Montagne ſur les confins de l’Armenie Majeure, à douze milles de Simyra, que l’on croit être maintenant la ville d’Erzerum. La ſource de l’Euphrate eſt au pied de cette montagne, que les Anciens nommoient auſſi Capotes ; & que ceux du païs appellent aujourd’hui Caicol, ſelon le rapport de Thevet. * Pline, lib. 5. cap. 24. SUP.

ABA, Ville de la Phocide en Grece, fut autrefois fameuſe par les Oracles qu’Apollon rendoit dans un de ſes Temples, & dont il fut ſur-nommé Apollo Abæus. C’eſt celle que Xerxès brûla, l’an 274. de Rome, 480. ans avant la venuë de Jesus-Christ. Les peuples de cette ville, que l’on nommoit Abantes, paſſerent dans l’Iſle d’Eubée, qui eſt aujourd’hui le Negrepont, & lui donnerent le nom d’Abantis. * Strabon, liv. 10. SUP.

ABABA ou Abaqua, Alaine de nation, fut mariée dans la Thrace à un certain Goth, nommé Micca ou Mecca, qu’elle fit pere de Maximin, depuis Empereur, après la mort d’Alexandre Severe, en 235. Ababa accoucha dans un village de Thrace, où Maximin fut berger, avant que de ſe mettre parmi les gens de guerre. * Herodien, liv. 7. & 8. Jornandes, in Getic. cap. 15. Jule Capitolin, in Maxim, &c.

ABACARES, peuples de l’Amerique Meridionale, près du fleuve Madere, qui ſe décharge dans la riviere des Amazones. * Texeira.

ABACHU. Cherchez Bacu.

ABACOA, une des Iſles Lucayes dans l’Amerique Septentrionale. Elle n’eſt pas éloignée de la Lucaïoneque, entre Jabaquem & les écueuils de Bimini. Les Anglois ſont aujourd’hui les maîtres de l’Abacoa. * Oviedo, liv. 2. cap. 6. Herrera, Sanſon, Du Val, &c.

ABACU. Cherchez Bacu.

ABACUC ou Habacuc, de la Tribu de Simeon, tient le huitiéme rang parmi les douze petits Prophetes. Son nom ſignifie Luiteur. Il y a apparence qu’il vivoit ſous le regne de Manaffés Roi de Juda. Il annonça la captivité des Juifs, & leur fit eſperer une heureuſe délivrance. Sa Prophetie, qu’il appelle Onus, n’a que trois Chapitres, dont le dernier a pour titre, Oraiſon pour les ignorances. Son corps & celui du Prophete Michée furent trouvez, du tems de Théodoſe l’Ancien, par Sebenne Evêque d’Eleutheropolis dans la Paleſtine. Mais au reſte, il ne faut pas oublier qu’il y a eu Abacuc qu’un Ange enleva, lorſqu’il avoit preparé à dîner à ſes moiſſonneurs, & pour lui faire porter cette viande dans la foſſe où Daniel étoit enfermé. Saint Jerôme, l’Auteur de la vie des Prophetes qu’on attribuë à Saint Epiphane, & quelques autres eſtiment, que c’eſt le même que le Prophete dont j’ai déjà parlé ; mais il y en a grand nombre d’autres, qui ſoutiennent le contraire. * Saint Jerôme, Pref. in Daniel. Bellarmin, de Script. Eccl. Torniel, A. M. 3351. Socrat. liv. 7. cap. ult. Martin de Roa, in Habac. Ribera, Sanctius, Pontanus, & Maldonat induod. Proph. minor. [ Onus en Latin répond à l’Hebreu Maſſa, qui vient de Naſa, porter, mais qui fignifie auſſi diſcourir, d’où vient que Maſſa au commencement des Prophetes doit être traduit diſcours. Voyez le Dictionaire de Jean Coccejus].

ABADIR, c’eſt le nom qu’on donna à cette pierre que Saturne dévora, croyant manger ſes enfans. Il avoit ſçû que ſes enfans le devoient chaſſer du thrône ; pour éviter un ſi grand mal, il avoit ſoin de ſe faire apporter les enfans que Rhée ou Ops ſon épouſe mettoit au monde ; & il dévoroit les mâles. Cette mere chagrine fit venir les Corybantes, au tems de ſes couches, croyant que le bruit qu’ils feroient, empêcheroit Saturne d’entendre les cris de l’enfant. Mais ces précautions ayant été inutiles, le pere demanda l’enfant, & on lui donna la pierre Abadir, envelopée dans les langes, qu’il dévora ſans découvrir le ſecret.

→Ceux qui cherchent la moralité de cette fable, y rencontrent le Tems ſignifié par Saturne. Ce qui eſt d’autant plus vrai-ſemblable, que les Grecs appellent Saturne, du nom, Κςό, & que ce nom eſt preſque le même que Xςό, qui ſignifie le tems ; & les Latins le nomment Saturnus, parce que, comme dit Cic. de nat. Deor. ſaturatur annis, il ſe raſſaſie d’années, ou bien de ſes propres enfans, qui ſont toutes les choſes que le tems produit, & conſume. Lactance dit que cette pierre étoit le Dieu Terminus : ce qu’Heſychius dit auſſi. Les Grecs la nommoient Baitolon ; les Latins, qui l’ont appelée Abadir, ont apparemment tiré ce nom de l’ Abdir, ou Abadir, ou Abadier des Syriens. Il y a apparence que le ſentiment de Lactance eſt veritable, que cette Abadir eſt Terminus, & que Terminus eſt le même que Jupiter. Pauſanias dit que la pierre Abadir étoit gardée dans le Temple qu’Apollon avoit à Delphes. * Priſcien, liv. I. 5. & 7. Lactance, de falſ. Relig. lib. I. c. II. Cartari, de Imag. Deor. &c.

[On peut voir ce que Bochart dit du mot Abaddir & de celui de Bætulium, dans ſon Canaan lib. 2. c. 2. D’autres croyent que du tems de Saturne, où les hommes étoient extrémement ignorans & barbares, il ſe commettoit de grands crimes, que l’on prend mal à propos pour des fictions des Poëtes ; fictions d’autant plus impertinentes, ſi c’en étoient, qu’elles diroient en termes fort obſcurs des choſes que l’on voit tous les jours, & que perſonne n’ignore. On avoit prédit à Saturne que ſes fils le dépoſſederoient : ( Voyez Saturne) ſi bien que pour prévenir ce mal, il réſolut de tuër tous ceux qui lui naitroient. Il le fit, à l’égard des premiers, mais Rhée le trompa enſuite, en lui donnant des enfans qui n’étoient pas d’elle, qu’il faiſoit tuer croyant que ce fuſſent ceux de ſa femme. Ces myſteres ſe découvrent par le moyen de la langue Phénicienne, qui étoit alors en uſage, ou au moins qui reſſemble à celle qui l’étoit. En Phénicien Aben, en mettant un Aleph devant Ben, comme font les Arabes, ſignifie également un Fils & une Pierre. Le mot Achal, dans les Langues Orientales, ſignifie tuer, & manger ; de ſorte que pour dire que Saturne tuoit les enfans que Rhée lui faiſoit remettre entre les mains, on a dit qu’il mangeoit des pierres. On a appellé ces prétenduës pierres, Abaddir, ce qui eſt un mot formé de ces deux Aben-dir, qui ſignifient l’enfant d’un autre, car dir peut être la même choſe que zar, qui eſt à dire alienus, parce que le Daleth & le Zaïn ſe changent facilement, & que l’on n’a aucun égard aux voyelles dans les Etymologies Orientales. Le mot de Bætulium vient de Batal, ou Batil, comme écrivent les Arabes, qui veut dire faux & mépriſé ; ce qui convient fort bien avec l’hiſtoire, que l’on vient de rapporter, puiſque les enfans, que Saturne faiſoit mourir, n’étoient pas de Rhée, mais apparemment de quelque Eſclave. Voyez les notes ſur la Théogonie d’ Heſiode de l’Editïon d’Amſterdam 1701. in 8. où la choſe eſt un peu autrement expliquée.]

ABADDON, nom que Saint Jean, dans ſon Apocalypſe, donne au Roi des ſauterelles, Anges de l’Abyme ; qu’il explique par le nom Grec ’Aπολλνων, (c’eſt-à-dire, qui fait perir) en Latin Exterminans, qui fignifie Exterminateur. Ce Roi Ange eſt la figure de Satan ; ou du Démon. * Saint Jean, Apoc. cap. 9. SUP.

ABAELARD. Cherchez Abaillard.

ABAFFI ou Apaffi, (Michel) c’eſt le nom du Prince de Tranſilvanie, qui a gouverné ce païs depuis l’an 1661. juſqu’à l’an 1690. auquel il eſt mort. Il étoit Comte des Sicules, & fils d’un Magiſtrat de la ville d’Harmanſtadt, capitale de la Tranſilvanie. Il eut un puiſſant competiteur dans la perſonne de Chimin Janos, qui étoit ſoûtenu par l’Empereur ; mais le Grand Seigneur protegea Michel Abaffi, & cette protection prévalut. D’autres competiteurs qu’il eut, & qui s’adreſſerent au Grand Seigneur, ne firent rien à ſon deſavantage. On ſçait aſſez la part qu’il prit dans les guerres, que les Turcs firent dans la Hongrie en 1663. & en 1683. * Hiſt. des Troubles de Hongrie, &c.

ABAGA, Roi des Tartares ſur la fin du XIII. ſiecle. Il attaqua les Perſes, qu’il ſoûmit ; & enſuite il ſe rendit redoutable aux Chrétiens, par ſes victoires continuelles. Ceux qui étoient reſtez dans la Terre Sainte experimenterent la verité de ce que je dis. Il envoya des Ambaſſadeurs au II. Concile General de Lyon. * Genebrard & Calviſius, in Chron. Sabellic. &c.

ABAGARE, Augare, Abgare ou Agabare, Roi d’Edeſſe dans l’Ofroëne, vivoit du tems du Fils de Dieu. Il ouït parler des merveilles de ſa vie, & il ne douta point que ce ne fût le Meſſie promis aux hommes. Il prit même la liberté d’écrire à Jesus-Christ, pour le prier de venir à Edeſſe, où il pourroit être plus commodément qu’à Jeruſalem, & parmi les Juifs. Il attendoit encore que le Sauveur le gueriroit d’une maladie, dont il étoit attaqué depuis long-tems. Le Fils de Dieu approuvant la foi & le zéle d’Abagare, lui envoya ſon portrait ; & lui écrivit qu’il ne pouvoit point aller en Syrie ; mais qu’après ſon Aſcenſion, un de ſes Diſciples paſſeroit à Edeſſe, & que lui apprenant les myſteres du ſalut, il lui donneroit la ſanté de l’ame & celle du corps. C’eſt ce que Saint Thadée executa depuis, car il guerit Abagare, & convertit les Ofroëniens. * Euſebe lib. I. Hiſt. cap. 13. Nicephore, Baronius, &c.

→ Divers Auteurs s’inſcrivent en faux contre ces Lettres. Euſebe aſſûre pourtant qu’il les a tirées des archives de la ville d’Edeffe. Saint Ephrem, qui étoit Diacre de cette ville, en fait mention dans le Traité qui a pour titre, le Teſtament d’Ephrem. Le Comte Darius les cite, dans une Epître de Saint Auguſtin ; & Théodore Studite dans une autre au Pape Paſchal.

Quelques Modernes, qui improuvent tout ce qu’on peut dire en faveur de ces Lettres, s’attachent au Decret du Pape Gelaſe, qui les met entre les Ouvrages Apocryphes. Mais ſans prendre parti, il me ſemble que nous pouvons dire que ce Pape n’a point eu deſſein de condamner ces Lettres, mais ſeulement d’empêcher qu’on ne leur donnât dans l’Egliſe la même autorité, qu’on y donne aux Saintes Ecritures. Quoi qu’il en ſoit, il me ſemble que ce qu’on dit d’Abagare ſe pourroit prouver par le témoignage de Saint Matthieu, qui nous aſſûre que la renommée des merveilles, que le Fils de Dieu operoit dans la Judée & dans la Galilée, s’étoit repandue dans la Syrie, où étoit la ville d’Edeſſe. Cedrene & les Auteurs du Bas-Empire parlent de la Lettre de Jesus-Christ à Abagare. Elle ſut portée en 744. à Conſtantinople. S. Jean de Damas, Evagre, & divers autres Auteurs font mention de cette Image du Fils de Dieu. Le Pape Adrien, dans une Epître à Charlemagne, dit que cette Hiſtoire avoit été reçûë dans un Concile de Rome, ſous le Pape Etienne. Outre cela, les Grecs ont dans leur Menologe la Fête de la Tranſlation de cette Image : ce que le P. Gretfer établit aſſez bien, en répondant à ce que Caſaubon a écrit à ce ſujet, contre le Cardinal Baronius. * Euſebe, lib. I. cap. 13. S. Auguſtin, ep 263. S. Jean de Damas, lib. 4. de fide Orth. Cap. 17 . Evagre, lib. 4. cap. 26. Baronius , &c.

ABAGARUS ou Abagare, ou ſelon d’autres Agbare, (parce que ce dernier nom en Arabe ſignifie très-puiſſant) étoit un nom commun aux Rois d’Edeſſe en Syrie ; comme celui de Ptolomée aux Rois d’Egypte. Il eſt parlé d’Abagare, Roi d’Edeſſe, dans l’article précedent ; & l’on y a remarqué les divers ſentimens des Auteurs touchant la Lettre qu’il écrivit à Jesus-Christ, & la réponſe qu’il en reçût : mais on n’y a pas rapporté les raiſons de ceux qui n’ajoûtent point de foi à cette Hiſtoire, dont voici les principales. Ils diſent que ces Lettres ont été déclarées apocryphes, par le Pape Gelaſe I. & par le Concile Romain tenu ſous lui en 494. Que Melchior Canus, Evêque des Canaries, & le Cardinal Bellarmin ont ſuivi cette déciſion. Qu’il n’y a pas d’apparence, que ſi cette Hiſtoire étoit veritable, perſonne n’en eût parlé pendant trois cens ans, Qu’Euſebe