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José brandit le poignard en disant : « Tout de suite ! »

Jamais dans sa vie, le pacifique José Labbé n’avait montré des instincts si féroces. Le poignard n’est pas dans nos mœurs et nous ne sommes pas batailleurs ; nous avons l’humeur bonne et endurante. Mais le soldat Labbé s’était dit : « Si j’attends à ce soir, je suis un homme fini, je ne saurai rien, il aura repris son poignard, il aura consulté ses amis, j’aurai tout perdu le fruit de mes efforts : il faut absolument que je fasse un grand coup, je vais le prendre à la gorge. Bon Dieu ! ce n’est pas une petite affaire que d’assassiner son prochain. Ah ! si la pauvre bonne femme de mère Labbé voyait son José, qu’est-ce qu’elle dirait ? ça l’achèverait. Mais aussi, s’il y avait des millions au bout de tout ça. Après tout, tuer un Italien ce n’est toujours pas plus mal que de tuer un Irlandais ; et puis, je ne le tuerai peut-être pas, je vais y aller en douceur. » Le pauvre garçon n’avait probablement pas eu le temps de se faire toutes ces réflexions, mais tout cela avait tournoyé dans son cerveau et avait contribué à amollir son élan. Heureusement, car s’il avait frappé, c’aurait été inutilement. En effet, Frascani, au lieu de se défendre, lui avait tendu la main en disant :

— J’accepte les deux louis.

José eut besoin de tout son courage pour ne pas le prendre dans ses bras et l’étreindre chaleureusement, tant il était satisfait de la tournure que prenaient les choses. Il tendit tranquillement les deux pièces à Frascani qui allongea la main. Mais l’autre se ravisa.

— En voici un ; dites-moi ce que contient la