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peg, n’hésita pas à écrire dans une pièce destinée à la publicité : « Je crois que ceux qui ont, pour ainsi dire, combattu nos propres combats (quoique peut-être d’une manière différente de la nôtre) recevront désormais les remerciements du peuple de la colonie ainsi que de la postérité »[1]. Quel soufflet pour les écrivailleurs de la même race que cet homme d’honneur qui se sont appliqués depuis à salir la mémoire de Riel et de ses braves !



Et dire que ce sont les mêmes bienfaiteurs du Manitoba qu’un étranger qui ne connaissait pas le premier mot de la situation, un soldat qui fut moins le favori de Mars que de la Fortune, osa stigmatiser du nom de bandits dans une proclamation qui restera pour sa honte éternelle[2] ! Ah ! il était bien plus facile à lui de déployer pompeusement ses troupes en rang de bataille autour d’un fort désert, et d’en enfoncer bruyamment les portes toutes grandes ouvertes, que de passer sans mésaventure ou erreur de jugement par les neuf mois de soucis et de luttes continuelles qui furent le partage de Riel et de ses lieutenants.

Qu’on veuille bien écouter ici un de ceux qui eurent à souffrir entre leurs mains des conséquences de leur propre légèreté. Parmi les 45 prisonniers dont nous avons parlé se trouvait un Dr John O’Donnell. Je traduis en la condensant une partie d’un article que ce monsieur publia pas plus tard que l’année dernière dans un journal de Winnipeg à propos des événements qui nous occupent[3].

Un de nos gardes avait une femme avec un nouveau-né, écrit-il. Quand celui-ci n’avait peut-être pas plus de deux semaines, sa mère fut prise de convulsions, et on m’envoya chercher pour la traiter. L’ayant mise sous l’influence du chloroforme pendant une de ses crises les plus violentes, mon succès à la tranquilliser provoqua les commentaires les plus favorables.

Quelque temps après, le même Geouton (?) m’envoya chercher pour un de ses enfants qu’on disait malade. Depuis ma première visite, je n’étais point gardé, mais allais et venais sur la foi de ma parole d’honneur. Quand

  1. The Creation of Manitoba, p. 92.
  2. Voici les propres paroles de Wolseley à ses soldats : « Bien que les bandits qui ont opprimé ce peuple aient fui à votre approche sans vous donner de chance de montrer comment des hommes capables de pareils travaux peuvent se battre, vous avez autant mérité de la patrie que si vous aviez gagné une bataille ».
  3. The Tribune, Déc. 15, 1906.