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Page:Morice - La Littérature de tout à l’heure, 1889.djvu/117

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attitudes… — Quel parti prendre ? Du haut de la chaire les Docteurs confirment l’opinion des Poètes et des Moralistes, nous répètent que notre nature est honteusement petite et faible. Il est vrai qu’ils ajoutent que si l’homme ne peut rien par lui-même il peut tout en Celui qui le fortifie : mais déjà l’humanité se détourne de ce Dieu de l’Évangile qui exige d’elle, en somme, à peu près les vertus impossibles des héros de Corneille. Elle est désespérée et dégoûtée. Quel parti prendra-t-elle ? Celui que lui conseillent La Fontaine et le bon-sens. Puisque l’héroïsme est chimérique, — et aussi bien inutile, fondé qu’il est sur l’égoïsme et l’amour-propre, — on n’y pensera plus. Puisque les passions ne causent que le désespoir, la sagesse initiale est de les éviter. Puisque l’homme est incapable de grandeur et de vertu, que du moins il vive tranquille : qu’il ait l’intérêt pour loi, mais qu’il ne le dise pas ; qu’il ruse avec la grandeur dont il connaît le néant, avec le malheur, c’est-à-dire avec la nature ; qu’il sache jouir des petits bonheurs et, fort seulement de sa triste expérience, qu’il passe, avec un sourire revenu de tout mais qui se moque de tout, au bord des choses sérieuses : — et le XVIIIe siècle est né. C’est la réaction de Corneille et c’est l’action de La Fontaine, — plus justement, c’est la conclusion logique du XVIIe siècle. Les Tragédies, les Comédies, les Maximes, les Fables et même les Sermons ont conduit aux Contes.