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Page:Morissette - Au coin du feu - Nouvelles, récits et légendes, 1883.djvu/66

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changements seraient tout autrement en faveur des gens respectables, que des prisonniers.

En effet, croit-on que la conduite des gardiens qui mènent les prisonniers comme des animaux ni plus ni moins ; croit-on que cette discipline que l’on donne aux forçats, les fasse devenir meilleurs ? Si réellement on le pensait, je pourrais donner le plus parfait démenti.

Le jour où j’ai reçu cent vingt coups de fouet, j’ai cessé d’être un homme pour devenir une brute. Mais je ne dois pas aller trop vite ; il me faut te conter comment on m’appliqua ma punition et comment je la supportai.

J’avais déjà eu l’occasion de voir plusieurs de mes compagnons recevoir un aussi grand nombre de coups que moi, mais j’avoue franchement que je n’avais pu me faire une idée de l’énormité de cette tortine, c’est bien le mot.

Donc, à dix heures moins le quart, on vint me chercher.

Je n’avais pas une très bonne contenance, mais sachant que mes compagnons avaient la vue sur moi, sur moi qu’on considérait déjà comme un être supérieur, je tâchai de paraître ferme.