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LE VAMPIRE

En chemin, Caudirol parlait à Sacrais,

— Comment es-tu arrivé à dépister la police ?… lui demanda-t-il. Tu connais ce monde-là pour le mieux ?

— Ah ! voilà… C’est un petit secret à moi. Mais je vais vous dire ça tout de même. Avant d’entrer dans ce genre d’affaires, j’ai étudié de près la police. J’allais dans les débits où se rendent d’ordinaire les mouchards. Ils aiment bien boire en général ; aussi j’ai appris par eux bon nombre de choses utiles.

— C’est le cas de dire que tu faisais des études in anima vili.

— Effectivement. D’autre part, j’ai fait des stations assez longues devant la caserne de la Cité, à l’heure où les mouchards arrivent au rapport. Je les connais tous de vue.

— C’est parfait… Mais nous sommes arrivés. Attention !

Les bandits s’arrêtèrent devant le mur du cimetière.

— Obliquons un peu sur la gauche, commanda Caudirol, c’est plus sombre.

Ils firent encore quelques pas dans la direction indiquée.

— Moi, je fais le guet, si ça vous va, proposa Le Nourrisseur. Je me mettrai de ce côté-ci.

— Et moi de ce côté-là, se hâta de dire Sacrais. Il faut être au moins deux.

Caudirol les regarda à la dérobée.

— Voilà deux lâches, pensa-t-il.

Il fit signe à ses hommes d’escalader le mur.

Les bandits se firent successivement la courte échelle et, deux minutes après, ils étaient tous dans le cimetière.

— Fichtre ! ce n’est pas gai, fit La Marmite à ses compagnons.

Ils se trouvaient dans la partie encore déserte, — si l’on peut employer ce terme, — de la grande nécropole.

À côté d’eux se trouvait le terrain vague où, nombre d’années avant, plus de huit mille insurgés avaient été enfouis après les fusillades et les mitraillades de l’armée versaillaise, en Soixante et onze.

Ils marchèrent silencieusement, repliés et rampants, guidés par Caudirol.

Après avoir traversé la partie du champ funèbre non remplie de morts, ils parvinrent à la grande ligne formée par les premières tombes.

Ils s’engagèrent dans les allées, impressionnés par la majesté de cette sombre solitude, mais résolus cependant à accomplir leur profanation.

— Avez-vous des outils, patron ? questionna à demi-voix Bambouli.

— J’ai un tourne-vis pour la bière et une pince pour faire sauter la ferraille.