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LES MYSTÈRES DU CRIME

Flack surmonta le sentiment de malaise qu’il éprouvait et se mit en devoir de déshabiller la baronne de Cénac.

Ce ne fut ni long ni difficile, car sa toilette n’était guère compliquée. En un moment, elle était nue…

Le brave garçon prit courageusement le corps, dont le froid le pénétrait, et il le plaça dans le lit.

— Un lit chaud, répétait-il, un lit chaud ! c’est facile à dire…

Jean-Baptiste Flack n’avait point voulu demander de secours, ayant tout intérêt à se tirer d’affaire seul.

Il se demandait avec anxiété comment il parviendrait à réchauffer ce corps glacé qui contenait encore une étincelle de vie.

L’idée que Mme de Cénac était morte ne lui vint pas. Son maître avait affirmé qu’elle était vivante et il le croyait sur parole.

Tout à coup, il se frappa le front.

— Parbleu ! il n’y a que ça à faire… L’intention sauve tout… Et puis je suis sûr de moi, peut-être ?… À la guerre comme à la guerre… Mon digne Flack, il faut te transformer en bassinoire…

Sa gaieté originale reprenait le dessus.

Il se dévêtit entièrement.

Puis il se glissa dans le lit à côté de Mme de Cénac, et, se collant contre elle, il essaya de lui transfuser sa chaleur, sa vie.

Quand son épiderme toucha le corps nu et glacé, il ressentit une secousse aiguë… Néanmoins il continua de se serrer avec force contre la baronne.

Après quelques moments, il se releva. Le lit était tiède, et les membres de la malheureuse femme semblaient moins roides.

Flack était pris d’un froid insupportable ; il se rhabilla et se plaça près du feu.

Puis il revint vers la couche et, avec un morceau de flanelle, il commença à frictionner le corps nu.

Sous l’influence de ce massage un soupçon de vie semblait reparaître.

Flack redoubla d’ardeur. Ses mains refoulaient, la chair blanche qui reprenait son élasticité normale… Il roulait le corps dans tous les sens, frictionnant avec énergie.

Tout à la pensée de ce sauvetage, il oubliait la bizarrerie de sa position.

Soudain, il crut remarquer un léger frémissement des narines chez la baronne de Cénac.

Il appliqua ses lèvres contre les siennes, et produisit de la sorte un mouvement de respiration factice.

Il considérait la victime de Caudirol qui reprenait ses sens.

Un souffle imperceptible s’échappait régulièrement de ses lèvres.