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LE DOCTEUR NOIR

On alla guérir le médecin du Palais de Justice.

Il accourut auprès du président et son premier soin fut de laver à grande eau la blessure.

Ce fut un redoublement de torture pour le patient dont on maîtrisait difficilement les secousses.

— On a jeté cette bouteille de vitriol à la face de M. Bartier, fit le docteur en ramassant la bouteille qu’il examina attentivement.

Il remarqua l’étiquette qui indiquait l’adresse d’un occuliste célèbre et son regard tomba sur le petit bain qui avait roulé sur un meuble.

Il reconstitua le scène aussitôt.

Au milieu de l’émotion générale, il dit en phrases entrecoupées :

— Voyez-vous, cette bouteille contenait une eau pour les yeux… On y a substitué un acide… Tenez… à ces taches jaunes… on reconnaît la morsure de l’acide nitrique… C’est cela même… Quelle monstruosité !

Au dernier rang des spectateurs de cette scène se tenait l’auteur de l’attentat…

Jean-Baptiste Flack était pâle. Son regard se reportait sur le président dont la gorge épuisée ne laissait plus échapper qu’un rauque gémissement.

— La vengeance est complète, murmura-t-il. C’est une œuvre terminée ; maintenant, il me reste à délivrer mon maître. J’y parviendrai…

Le service d’ordre intérieur du Palais de Justice, un moment désorganisé au milieu de l’émoi, se reformait.

On fit évacuer les couloirs et le président Bartier, après avoir été pansé, fut transporté à son hôtel.

Caroline y était déjà installée en maîtresse.

Une joie sauvage éclaira sa physionomie quand elle apprit l’accident.

Le juge était désormais sa proie.

Le misérable avait conscience de sa position.

Comme sa maîtresse l’engageait à espérer une prochaine guérison, il secoua la tête d’un air sombre.

— Non, dit-il, je suis aveugle. C’est l’enfer qui commence !

FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE