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LE DOCTEUR-NOIR

Il était absolument renversé.

Cette injonction d’avoir à remettre le Docteur-Noir à l’administration au moment où il venait de franchir le mur de Mazas et de se briser les reins lui parut être une disgrâce définitive.

— Ils me reprennent ce détenu, comme s’il y avait de ma faute dans sa tentative d’évasion. Je vais être révoqué, c’est certain. Ah ! les journalistes seront contents.

Le docteur lisait attentivement l’ordre d’extraction.

Jean-Baptiste Flack, très inquiet, pâlissait à vue d’œil.

— Vous venez directement de la Préfecture ? interrogea M. Cuplat.

— En droite ligne et sans perdre de temps, déclara Flack à l’aventure.

— Je le pense bien ; il n’a pas fallu que vous vous amusiez en route.

Le médecin réfléchissait.

— Emmenez-vous le prévenu dans un brancard ? fit-il à Jean-Baptiste Flack.

Ce fut pour celui-ci un trait de lumière.

— Dame, cela dépendra. Est-il bien mal ?

— Non, pas trop. Il a de la chance de ne pas s’être assommé du coup. Un mur de dix mètres, sans compter l’escalade du promenoir et celle du premier mur de ronde !

— Au fait, racontez-moi donc cela dans tous les détails, demanda le domestique du Docteur-Noir à M. Cuplat.

Le directeur fit le récit de la nouvelle tentative d’évasion de Lucien Bartier et raconta l’histoire de son télégramme écourté par la préfecture.

Flack comprit que le temps pressait.

— On peut arriver d’un moment à l’autre ou envoyer des ordres précis. Dans les deux cas je serai perdu, et la dernière chance de mon malheureux maître s’évanouirait.

Il s’adressa au médecin :

— Croyez-vous que le prisonnier puisse supporter le trajet en fiacre ?

— Je n’y vois pas de grave inconvénient.

— Alors cela va bien, car j’ai une voiture à la porte avec un agent.

— Faites-la entrer dans la cour, fit M. Cuplat ; pendant ce temps, on va quérir ce misérable Bartier.

Flack quitta le cabinet du directeur et regagna la rue.

Une voiture de place stationnait à l’entrée de Mazas.

Sur le siège, à côté du cocher, se tenait le soi-disant agent.

C’était La Marmite, gravement habillé et vieilli pour la circonstance.

Il avait singulièrement aidé ses nouveaux amis, depuis qu’il s’était lié avec eux.