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Page:Mother Earth - Vol. 2, n° 1, March 1907.djvu/547

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d’individus commettent des erreurs. Cet argument est un argument inattaquable contre l’indissolubilité du mariage mais pas contre le mariage lui-même.

Aujourd’hui, je m’intéresserai aux mariages heureux — les mariages au sein desquels, quelles que soient les frictions, l’homme et la femme ont passé beaucoup de moments agréables ensemble ; des mariages où la famille a vécu grâce au travail honnête, décemment payé (dans les limites du salariat) du père, et préservée par le souci d’économie et les soins de la mère ; où les enfants ont reçu une bonne éducation et ont démarré dans la vie sans problème, et où leurs parents ont continué à vivre sous le même toit pour finir leur vie ensemble, chacun étant assuré que l’autre représente un(e) ami(e) qui lui sera fidèle jusqu’à la mort. Telle est, d’après moi, le meilleur type de mariage possible, et il s’agit plus souvent d’un doux rêve que d’une réalité. Mais parfois il réussit à se réaliser. Je maintiens néanmoins que, du point de vue de l’objectif de la vie, c’est-à-dire du libre développement de l’individu, ceux qui ont réussi leur mariage ont mené une vie moins réussie que ceux qui ont eu une vie moins heureuse.

L’instinct de reproduction

En ce qui concerne le premier point (le fait que l’éducation des parents serait l’une des nécessités fondamentales de l’expression de la personnalité), je pense que la conscience va bouleverser les méthodes de la vie. La vie, qui opère inconsciemment, cherchait aveuglément à se préserver par la reproduction, par la reproduction multiple.

Notre esprit est chaque fois bouleversé par la productivité d’un seul grain de blé, d’un poisson, d’une reine des abeilles ou d’un homme. Nous sommes frappés par le gâchis épouvantable de l’effort reproductif ; paralysés par une pitié impuissante pour les petites choses, le nombre infini de ces petites vies qui doivent naître, souffrir et mourir de faim, de froid, ou parce qu’elles servent de proies pour d’autres créatures, et tout cela dans un seul but : afin que, au sein d’une multitude, seule une petite minorité survive et perpétue l’espèce ! En guerre contre la nature, l’homme, qui n’en est pas encore maître, a obéi au même instinct et, en procréant de façon prolifique, il a poursuivi sa guerre.

Pour le patriarche hébreu de l’Antiquité comme pour le pionnier américain, une grande famille était synonyme de force, de richesse en bras et en muscles et représentait un moyen de poursuivre sa conquête des forêts et des terres vierges. C’était sa seule ressource contre l’anéantissement. C’est pourquoi l’instinct de reproduction a été l’un des moteurs déterminants de l’action humaine.

Tout instinct obéit à une loi : il survit longtemps après la disparition du besoin qui l’a créé, et