Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/379

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Désormais c’est Tine-Tine qui attire le plus l’attention des indigènes ; il a le pas sur moi ; on ne crie pas : « Un blanc ou un farang ! » quand nous passons, mais : « Un petit chien ! » et tout le monde d’accourir pour voir cette curiosité ; notre tour ne vient qu’après. Dans ces montagnes, les Laotiens font aux génies locaux des offrandes de pierres et de bâtons.

Les pluies avaient commencé lors de ma seconde entrée dans le Dong-Phya-Phaye, où je reçus pour baptême un déluge épouvantable ; elles ont continué depuis, parfois avec des interruptions d’un ou de deux et quelquefois de trois jours ; mais elles ne m’ont pas arrêté un instant, quoique j’eusse à traverser une région plus redoutée encore des Siamois que cette forêt du Roi-du-Feu, et où aucun d’eux ne s’engage volontairement.

C’est la même chaîne qui, des bords du Ménam, dans la province de Saraburi, s’étend au sud le long du golfe de Siam, entoure le Cambodge comme d’une ceinture, longe toutes les côtes du golfe, et y forme une centaine d’îles et d’îlots, tandis que, de l’autre, elle court directement au nord, toujours grandissant et étendant à l’est ses ramifications, qui forment mille vallées étroites et déversent toutes leurs eaux dans le Mékong.

Dans cette région de montagnes, les éléphants seuls servent aux transports ; il n’est pas de village qui n’en possède un certain nombre, et plusieurs petites villes ou bourgs en comptent de cinquante à cent ; j’appellerais volontiers cet intelligent animal la frégate des jungles et des montagnes tropicales ;