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L’ENVERS DU JOURNALISME

naires, intéressantes ou insignifiantes qu’il avait vues dans les gazettes.

On était en novembre. Il n’y avait pas encore de neige, mais il faisait déjà froid et on tenait les fenêtres fermées dans la rédaction. Les vitres, peu souvent lavées et encrassées par la fumée des pipes, ne laissaient passer qu’un jour terne, qui éclairait vaguement les physionomies fermées des reporters. Ils fumaient et lisaient, en échangeant des monosyllabes, de courtes exclamations que leur arrachait tel ou tel article.

Désespérant de découvrir quoi que ce soit dans cette étude des figures qui l’entouraient et dont aucune ne le regardait, Martin s’assit, prit le journal laissé par Bernier et se mit à lire lui aussi.

Au fond de la pièce, où le jour était encore plus maussade et plus douteux, Bernier, après avoir attendu que le city editor eût fini son travail, causait maintenant avec lui. Le city editor, tout en répondant, jetait de temps en temps un coup d’œil sur Martin, qui ne s’en apercevait pas, et examinait un peu de quoi avait l’air le nouveau venu.

Il vint trouver Martin et l’emmena à l’écart.

« Comme ça », lui dit-il, « vous voulez entrer dans le « reportage » ? »

— Oui, monsieur, répondit Martin. Je suis sans situation ; je voudrais gagner ma vie, et on m’a dit que je pourrais peut-être y réussir ici.

— C’est dur, vous savez, le travail dans un journal.

— Ça ne fait rien. Je suis prêt à travailler.

— Combien demanderiez-vous par semaine ?