Page:Mousseau - L'envers du journalisme, 1912.djvu/114

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
145
L’ENVERS DU JOURNALISME

de zèle pour la ligue des citoyens et d’enthousiasme pour le bien de la cité.

L’arrivée des orateurs les intéressa fort, surtout quand ils virent que Crevier se trouvait parmi eux. Il leur fit un signe amical de tête, qu’ils interprétèrent comme une promesse.

Les discours commencèrent. « Prends des notes, » dit Delisle à Martin ; « je vais aller lui parler. » Mais ce n’était pas facile d’approcher de Crevier. Il vit l’embarras de Delisle, écrivit un mot sur un morceau de papier et le lui passa.

« Qu’est-ce que c’est, » demanda Martin à Delisle, qui était revenu près de lui ?

Ils déplièrent le papier. Crevier avait écrit, dans un style tout à fait conforme aux habitudes de mystère des périodes électorales : « J’ai des sesterces. » Cela voulait évidemment dire, en langage vulgaire, des billets de banque. Martin redoubla d’ardeur au travail, pendant que Delisle roulait une cigarette.

Dans l’intervalle entre deux discours, Crevier appela Delisle en arrière de l’estrade et lui remit discrètement les « sesterces ». Il appela ensuite Martin et le traita de même.

Le reste de l’assemblée sembla court aux deux amis, pour qui le travail était devenu excessivement agréable.

Quand l’assemblée eut pris fin, Delisle proposa de fêter l’aubaine inespérée qu’ils venaient d’avoir, en vidant une bouteille de champagne.

C’était le samedi et les épiceries étaient encore