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Somme toute, moi, qui fais passer la vérité avant quoi que ce soit, j’avertis un chacun que je ne paierai pas une prime de sauvetage aussi exorbitante. Que celui qui ne voudra pas me repêcher à moins me laisse tranquille, ne me sauve pas. Néanmoins, les dimanches et fêtes, je donnerai plus que dans la semaine, parce que, ces jours là, je porte ma chaîne de cannetille, et mon habit, numéro un.

Oui, le théâtre corrompt plus de monde que les romans. C’est tout un étalage. Oripeaux, fausses dentelles, papiers dorés, frappés à l’emporte-pièce, clinquant et verroterie, tout cela vous attire, vous enivre ! Je ne parle, bien entendu, que des enfants et des personnes qui ne sont pas dans les affaires.

Ce monde de la rampe ment et vous trompe, même, quand il veut représenter la pauvreté.

Une fille, dont le père s’est ruiné, travaille pour soutenir sa famille. Très bien. La voilà assise, cousant, tricotant, ou brodant. Mais comptez-moi les points qu’elle fait, pendant la durée d’un acte entier. Elle bavarde, elle soupire, elle va à la fenêtre, mais elle n’avance pas son ouvrage. Vous m’avouerez que la famille qui peut vivre de son travail n’a pas de grands besoins. Cette fille est naturellement l’héroïne de la pièce. Elle a jeté deux ou trois séducteurs en bas de son escalier. Elle s’écrie, à tous moments : „Ô ma mère ! ma mère !” Et elle représente la vertu.

Qu’est-ce-qu’une vertu à laquelle il faut un an pour tricoter une paire de bas ?

Tout cela ne donne-t-il pas une fausse idée de la vertu et du travail pour vivre ?

Mensonges ! mensonges !

Tout-à-coup revient son premier amant, qui,