Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/369

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les contours s’enflamment ; des éclairs commencent à jaillir, et des flèches de feu traversent de nouveau l’espace, pour ne plus retomber ; elles s’enfoncent, et pénètrent dans le fond gris du ciel ; leurs rayons ardents s’élargissent en cercles plus étendus ; ils se rencontrent, s’entre-croisent, serpentent, errent de tous côtés, se courbent ou se relèvent, et se réunissent en faisceaux, fulgurants, projetant leur éclat doré sur un ciel d’azur… Du rouge, du bleu, du jaune, de l’argent, du pourpre, azurés…

Dieu du ciel, c’est l’aurore !

C’est l’heure du rendez-vous !

Ils allaient se revoir ! Saïdjah ne savait pas de prière. C’eût été grand dommage qu’on lui en eût appris, car en aucune langue humaine, il ne se trouve prière plus sainte, action de grâces plus fervente, que son extase muette.

Il n’aurait pas voulu aller à Badour.

Revoir Adenda de la sorte lui paraissait moins enviable que la certitude de sa prochaine arrivée.

Il était assis au pied de l’arbre, et laissait errer son œil sur le paysage.

La nature lui souriait ; elle avait l’air de lui souhaiter la bienvenue, comme une mère à son enfant ; et de même que dans sa joie, celle-ci se rappelle volontiers les douleurs passées, et se plonge dans ses souvenirs d’autrefois, de même Saïdjah se plaisait à revoir tous les endroits, qui lui retraçaient sa première enfance.

Mais, ses yeux et ses pensées avaient beau ne pas se fixer, son regard et son cœur s’élançaient sans cesse vers le sentier conduisant de Badour à l’arbre. Tout ce que ses sens percevaient lui criait : Adenda…

À gauche, là où la terre est si jaune, un jour,