Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/94

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peut-être trop vivement cette réponse. Ne voulant rien dire de blessant, il aurait dû se souvenir qu’un Régent de Lebac n’aime pas à entendre louer les chemins de Pandeglang, même quand par hasard, ils se trouvent meilleurs que ceux de Lebac.

Le Prince-Régent ne commit pas pareille faute. Son petit domestique s’était déjà retiré, rampant en arrière sur les talons jusqu’à l’entrée de la tente, où il venait de reprendre place parmi ses camarades,… le Prince-Régent avait eu le temps de se rougir les lèvres et les quelques dents qui lui restaient avec le jus du bétel, avant de répondre.

— Oui, il y a beaucoup de monde à Pandeglang. Tout familier, connaissant le Prince-Régent et le contrôleur, et, partant, au fait des secrets de Lebac, eût parfaitement compris que l’entretien était déjà devenu un débat.

— C’est vrai, fit Dipanon, nous avons peu de monde ici, mais…

Le Prince-Régent le regarda, comme s’il s’attendait à une attaque. Il savait qu’après le : mais, pouvait suivre quelque chose de désagréable pour celui qui depuis trente ans était régent de Lebac.

Dipanon, coupant court, redemanda au gardien s’il ne voyait rien venir ?

— Rien encore sur la route de Pandeglang, monsieur le contrôleur, mais là-bas, de l’autre côté, arrive quelqu’un à cheval… c’est le commandant…

— Pour sûr, Dongso ! s’écria Dipanon. Il chasse dans le voisinage ; il est parti ce matin de bonne heure… Hè ! Declari ! Declari !

— Il vous entend, Monsieur, il vient par ici. Son domestique le suit ; je vois même une carnassière sur la croupe de son cheval.