Page:Murger - Les Nuits d’hiver, 1861.djvu/270

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On n’a guère su que par l’annonce de sa mort la maladie de Henry Murger, tant il a été promptement enlevé !

Il semblait plein de joie et d’espérance, et il comptait pour sa réputation littéraire sur le volume de poésies qu’il préparait, une fraîche gerbe de jeunes souvenirs. Il y avait mis le plus pur sang de son cœur et toutes les tendresses de son âme ; car Murger était un poëte dans son œuvre et dans sa vie. Il suivait son rêve sans souci de la réalité, et ne remplaçait pas l’inspiration par ce travail voulu, presque mécanique, qui seul assure l’existence précaire de l’homme de lettres. Ce n’était pas paresse chez lui, c’était sobriété naturelle, délicatesse de goût, amour du trait vif et net. Il cherchait le mot et non la phrase, et, l’émotion atteinte, il s’arrêtait, trouvant que la page finissait là. Par malheur, ce sont les longs romans qui rapportent ; l’esprit tient peu de place ; une larme ne couvre pas beaucoup de papier, et la sollicitude du ministre a dû intervenir pour entourer de soins la fin du poëte et donner à ses funérailles une pompe décente.

Cette mort a été douloureusement ressentie. Henry Murger possédait un talent sympathique : il se faisait aimer de ses lecteurs. — Son esprit, et personne peut-être depuis