tournant vers le passé, il interrogeait son cœur ou son esprit, qui lui racontaient toutes les scènes de sa jeunesse. Il dit quelque part, dans la Vie de bohème : « C’est après l’orage que j’ai peint mon tableau. » Si son tableau n’est jamais assombri, c’est qu’il nous le montre à travers l’arc-en-ciel du poète. Peut-être l’homme pleurait au battement de son cœur, mais le conteur s’égayait aux souvenirs irisés.
Plus que tout autre, Murger a fait vibrer en nous la chanson des vingt ans. Pareil à la belle fille d’Ionie qui n’avait pas une cithare dorée, mais qui était plus écoutée parce qu’elle chantait les airs chers aux amoureux, il nous charmait bien plus que ceux-là qui jouent les grands airs savants avec l’archet d’or d’Apollon. Son Parnasse n’était pas si haut ; son violon n’était pas un stradivarius ; mais il avait une âme comme celui d’Hoffmann, et il en jouait jusqu’aux larmes.