Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Œuvres posthumes.djvu/288

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nière arrêtée. J’en changerai probablement plusieurs fois encore.

J’ai retranché du dernier poème plusieurs choses un peu trop matérialistes, et y ai laissé dominer le dandysme, qui est moins dangereux. Je cherche à éviter les ennemis, et n’y réussirai très probablement pas ; mais je crois que jusqu’à présent, mon père, qui lit les journaux très exactement, a plus peur que moi. La critique juste donne de l’élan et de l’ardeur. La critique injuste n’est jamais à craindre. En tout cas, j’ai résolu d’aller en avant, et de ne pas répondre un seul mot.

Tout cela d’abord est assez amusant ; je ne peux pas m’empêcher de rire toutes les fois que je me rencontre étalé.

J’attends tes avis. Mes amis m’ont fait des éloges que j’ai mis dans ma poche de derrière. C’est à quatre ou cinq conversations avec toi que je dois d’avoir réformé mes opinions sur des points très importants ; et depuis j’ai fait bien d’autres réflexions. Mais tu sais qu’elles ne vont pas encore jusqu’à me faire aimer Racine.

Adieu donc, mon bon oncle. Aime-moi toujours, et crois que je te le rends du meilleur de mon cœur. Je n’ai qu’un regret ; c’est de ne t’avoir pas auprès de moi pour me servir de guide et d’ami.

Ton neveu,
Alfred de Musset.
Janvier 1830.