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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes I.djvu/253

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était de son intérêt d’en montrer. Bien qu’elle n’eût réellement rien envoyé au jeune homme, elle vit qu’il y avait moyen de lui faire prendre le change ; elle répondit, il est vrai, qu’elle ne savait de quoi il lui parlait ; mais elle eut soin, en disant cela, de sourire avec tant de finesse et de rougir si modestement, que Pippo demeura convaincu, malgré les apparences, que la bourse venait d’elle. — Et depuis quand, lui demanda-t-il, avez-vous à vos ordres cette jolie négresse ?

Déconcertée par cette question, et ne sachant comment y répondre, Monna Bianchina hésita un moment, puis elle partit d’un grand éclat de rire et quitta brusquement Pippo. Resté seul et désappointé, celui-ci renonça à la visite qu’il avait projetée ; il rentra chez lui, jeta la bourse dans un coin, et n’y songea pas davantage.

Il arriva pourtant quelques jours après qu’il perdit au jeu une forte somme sur parole. Comme il sortait pour acquitter sa dette, il lui parut commode de se servir de cette bourse, qui était grande, et qui faisait bon effet à sa ceinture ; il la prit donc, et, le soir même, il joua de nouveau et perdit encore.

— Continuez-vous ? demanda ser Vespasiano, le vieux notaire de la chancellerie, lorsque Pippo n’eut plus d’argent.

— Non, répondit celui-ci, je ne veux plus jouer sur parole.

— Mais je vous prêterai ce que vous voudrez, s’écria la comtesse Orsini.