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homme qu’il considérait comme le premier poète de l’Italie moderne. Il avait même recueilli quelques renseignements biographiques, dans ce dessein ; mais, en y rêvant, il préféra payer en vers son tribut d’admiration et de sympathie au Sombre amant de la Mort. De là sortit le morceau intitulé Après une lecture, qui parut le 15 novembre 1842.

En faisant la part de son exagération naturelle et de son excessive sensibilité, il faut pourtant reconnaître que, dans cette fatale année 1842, les blessures ne furent pas épargnées à Alfred de Musset. Il se plaignait que, de tous les côtés à la fois, lui venaient des sujets de désenchantement, de tristesse et de dégoût. « Je ne vois plus, disait-il, que les revers de toutes les médailles. »

Il n’y avait pas jusqu’à la dégradation des lettres qu’il ne ressentît avec douleur. Le roman-feuilleton touchait alors à son plus haut degré de vogue, d’audace et de cynisme, et tout ce qui tenait une plume pouvait, à bon droit, s’en trouver humilié. Alfred en rougissait, comme tous les esprits délicats. D’une part, il voyait la littérature d’imagination salie et polluée, l’honnêteté littéraire, l’amour du beau, le goût public faire partout défaut, tandis que, d’une autre part, les talents perdaient courage. À trente-deux ans, il se plaignait d’avoir trop vécu. Qu’on ajoute à cela ses idoles brisées, l’image de Rachel déflorée, Pauline Garcia partie et oubliée, l’exil volon-