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ET SES AMIS

de préférence, au succès d’orgueil qu’elle remporta quelques semaines plus tard à Augerville, alors que la marche triomphale de la Grande Mademoiselle se continuait d’Orléans à Étampes.

« Je trouvai à Augerville, écrit la duchesse de Montpensier[1], l’escorte que l’on m’avait envoyée, et comme il faisait très beau temps, je montai à cheval avec mesdames les comtesses de Fiesque et de Frontenac, lesquelles m’avaient toujours accompagnée. Et à cause de cela Monsieur leur avait écrit, après mon entrée à Orléans, des compliments sur leur bravoure d’avoir monté à l’échelle en me suivant, et au-dessus de la lettre il y avait mis : À mesdames les comtesses, maréchales de camp dans l’armée de ma fille contre le Mazarin. Depuis ce temps-là, tous les officiers de nos troupes les honoraient fort. De sorte que Chavagnac qui était le maréchal de camp qui commandait mon escorte leur dit : « Il est juste que l’on vous reçoive, étant ce que vous êtes. » En même temps il fit faire halte à un escadron d’Allemands qui marchait devant moi, et il dit au colonel, qui se nommait le comte de Kinski, de saluer la comtesse de Frontenac, qui était la maréchale de camp. Ils mirent tous l’épée à la main et la saluèrent à l’allemande ; et il fit tirer tout un escadron pour lui faire honneur, entrant aussi bien dans cette plaisanterie que s’il était Français. »

La salve d’honneur d’Augerville fait heureusement oublier la dégoûtante accolade d’Orléans. Toutefois, malgré la distinction suprême de cette ovation magnifique où la galanterie innée du militaire s’affinait des belles manières du gentilhomme français, le chevalier des dames par excellence, cette plaisanterie, c’est le mot, — très exact — des Mémoires de la duchesse de Montpensier, cette plaisanterie, dis-je, n’en revêt pas moins un caractère romanesque, caractère qui sera le trait dominant de la réputation mondaine de la comtesse de Frontenac.

Je ne prétends pas défendre Madame de Frontenac

  1. Cf : Carette, Mémoires de Mademoiselle de Montpensier, pages 84 et 85.