Page:Myrand - Frontenac et ses amis, 1902.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
70
FRONTENAC

dans un sentiment profond, inaltérable, de réciproque estime.

Qu’on ne m’accuse pas de vouloir, à plaisir comme à satiété, multiplier ici les affirmations gratuites et les phrases déclamatoires, de substituer à des arguments de froide raison, de frivoles raisons de sentimentalité. Au défaut de la correspondance échangée entre Madame de Frontenac et son mari, correspondance irrémédiablement perdue ou égarée, laquelle, conséquemment, il m’est impossible de produire au cours du présent débat, j’ai à l’appui de mon dire un document et un fait qui le confirment et le prouvent éloquemment.

Le document est ce Mémoire intitulé : Défense du comte de Frontenac par un de ses amis, identifié par l’archiviste Bédard comme étant de l’écriture de Madame de Frontenac et actuellement déposé à Paris, au ministère des Affaires Étrangères.

Ne faut-il pas attribuer au sentiment de l’honneur et de l’orgueil du nom, cette belle ardeur avec laquelle est écrit l’éloquent plaidoyer de la comtesse en faveur du gouverneur du Canada ? Remarquons encore que ce Mémoire porte la date de l’an 1681. Neuf années s’étaient donc écoulées depuis le départ de Frontenac, et cette longue absence n’était point faite pour raffermir cette affection conjugale ruinée par le scandale que l’on sait. Je ne vois donc qu’une raison d’orgueil politique à la chaleur de cette apologie. S’il en est une meilleure, qu’on me la signale et je l’accepterai volontiers.[1]

  1. Le zèle de l’avocate de Frontenac est souvent aveugle, et, par maints endroits, l’exagération en est manifeste. Le passage suivant de ce beau plaidoyer féminin en offre un bon exemple :
    « Ils ont, (Duchesneau et consorts) à défaut d’autres prétextes, essayé de persuader que M. de Frontenac était sujet à de grands emportements et ils se sont portés à des extrémités avec lui pour l’obliger à en venir aussi à la violence avec eux, et ce, dans la pensée de justifier tout ce qu’ils ont avancé contre lui. Quand M. de Frontenac ne serait pas connu pour un homme assez modéré, ce qui s’est passé cette année (1681) doit suffire à